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Quelles charges un bailleur privé peut-il déduire de ses revenus locatifs ?

Quand on loue un bien nu ou meublé, ce n’est pas seulement une question de loyers encaissés : pour évaluer correctement la rentabilité, il faut aussi tenir compte des charges et dépenses que le bailleur engage. Sous un régime fiscal favorable (souvent le « régime réel »), de nombreuses charges sont déductibles des revenus locatifs, ce qui réduit l’assiette imposable, voire peut créer un déficit fiscal. C’est un levier essentiel pour optimiser un investissement locatif.

Dans cet article, nous passons en revue les charges déductibles classiques en 2025–2026, les conditions pour qu’elles soient acceptées, les différences selon que le bien soit loué nu ou meublé, et ce qu’il faut surveiller pour que la déduction soit valide.

Rappels : micro vs régime réel

Avant d’entrer dans le détail, il faut rappeler deux choses :

  • Si le bailleur opte pour le régime micro (micro-foncier pour nu, micro-BIC pour meublé), il ne peut pas déduire ses charges réelles — il bénéficie d’un abattement forfaitaire. Pour le nu, cet abattement est aujourd’hui de 30 % (mais un projet 2026 le porterait à 50 %). 
  • Pour déduire des charges effectives, il faut opter pour le régime réel (ou être au-delà des seuils de recettes). Dans ce cas, seules les charges réellement supportées, payées et justifiées peuvent être déduites.

En pratique : si vos charges sont faibles, micro peut suffire. Si vous avez des travaux, des intérêts d’emprunt, des frais importants — alors le régime réel devient très intéressant.

Charges déductibles : location nue (revenus fonciers)

Quand le logement est loué vide (nu), le bailleur peut, sous le régime réel, déduire plusieurs types de charges — à condition qu’elles soient liées à la propriété louée, payées dans l’année, et justifiées. Voici les principales :

  • Intérêts et frais d’emprunt liés à l’acquisition, la construction, la réparation ou l’amélioration du bien, ainsi que les frais annexes (frais de dossier, garanties). 
  • Travaux d’entretien, de réparation, d’amélioration : les dépenses pour conserver le bien en bon état ou l’améliorer (peinture, remplacement de chaudière, volets, plomberie, etc.) sont déductibles. 
  • Charges de copropriété quand le bien est en copro : les provisions payées, à condition qu’elles ne soient pas récupérables auprès du locataire (part non récupérable sur charges). 
  • Taxe foncière : cet impôt local est déductible. 
  • Assurances : primes d’assurance liées au bien loué (propriétaire non occupant, etc.) sont déductibles.
  • Frais de gestion ou d’administration : par exemple les frais d’agence, les coûts liés à la gestion (annonces, dossiers, formalités), ou un forfait (souvent modeste — ex. 20 € par logement et par an) quand aucun autre frais n’a été engagé. 
  • Frais de relogement, indemnités d’éviction le cas échéant. 

À noter : certaines dépenses comme la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) si elles sont recouvrées sur le locataire ne sont pas déductibles.

Charges / frais déductibles : location meublée (BIC réel)

Quand le logement est loué meublé, la fiscalité change (BIC), mais le principe de la déduction au réel reste — avec des postes proches + des spécificités liées au mobilier. Voici les charges/frais déductibles quand le bailleur opte pour le régime réel BIC : 

  • Intérêts et frais de crédit liés à l’achat du bien ou à des travaux. 
  • Assurance du bien (propriétaire non occupant, etc.) et assurances liées au crédit. 
  • Charges de copropriété non récupérables — sinon il faut les exclure.
  • Charges de gestion, frais d’agence, frais administratifs, honoraires de comptables ou experts, frais de dossier. 
  • Travaux d’entretien/réparation — pour maintenir le logement en état, ou pour remettre aux normes — à condition de ne pas être assimilables à des travaux de reconstruction/agrandissement (selon la doctrine fiscale). 
  • Dépenses de remise en état suite au départ d’un locataire (si non récupérables) ou charges locatives impayées / irrégularités.
  • Amortissement du bien (bâtiment hors terrain), de l’équipement, mobilier, électroménager, cuisine, etc. — grande force du meublé réel : il permet de réduire fortement, voire annuler, le bénéfice imposable. 

En clair, quasiment tout ce qui coûte pour maintenir, gérer ou améliorer le logement et pour le meublé, tout l’équipement peut être considéré comme charge déductible au régime réel.

Conditions & limites de déduction

Pour que ces charges soient acceptées par l’administration fiscale, il faut respecter certaines conditions :

  • Les dépenses doivent avoir été effectivement engagées et payées durant l’année d’imposition. 
  • Elles doivent concerner un logement loué (et non un bien vacant ou personnel). 
  • Elles doivent être justifiées : factures, quittances, relevés, etc. Sans justificatif, pas de déduction. 
  • Si le logement est en copropriété : seules les charges non récupérables sur le locataire sont déductibles (provisions de charges, part non récupérable). Les charges refacturables ne le sont pas. 
  • Certaines dépenses — comme les travaux de reconstruction ou d’agrandissement — ne sont pas déductibles en tant que charges : elles peuvent entrer dans le cadre de l’amortissement, mais pas en dépense directe selon la doctrine fiscale.

Pourquoi c’est un levier important en 2025–2026

  • Beaucoup de bailleurs ont intérêt à passer au régime réel pour gagner en défiscalisation, surtout s’ils ont des charges importantes (travaux, copro, prêt, assurances, etc.).
  • Avec le contexte : rénovation énergétique, besoin de mise aux normes, coûts imprévus — le régime réel permet d’absorber ces dépenses sans ruiner la rentabilité.
  • Pour les meublés — particulièrement en LMNP réel — l’amortissement reste aujourd’hui l’un des meilleurs outils fiscaux pour lisser la fiscalité sur le long terme.
  • Enfin, dans le cadre du projet de nouveau statut du bailleur privé 2026, certaines réformes visent à encourager la location vide via des avantages (abattement micro-foncier porté, amortissement possible, déficit foncier plus généreux), ce qui redonne un intérêt à la fiscalité foncière classique.

Quelques exemples chiffrés (cas simplifiés)

Exemple 1 — location nue, régime réel

  • Loyers perçus : 12 000 €/an
  • Charges déductibles : prêt immobilier (intérêts) 2 000 €, taxe foncière 1 200 €, charges de copropriété non refacturables 800 €, assurance 300 €, travaux d’entretien 1 500 € → total charges = 5 800 €
  • Revenu imposable = 12 000 − 5 800 = 6 200 €

Si TMI 30 %, l’imposition sur ce revenu sera bien moindre que si l’on utilisait le micro-foncier (imposant sur 100 % des loyers ou 70 % selon abattement).

Exemple 2 — location meublée, régime réel + amortissement

  • Loyers + charges encaissées : 15 000 €/an
  • Charges & frais réels : intérêts de prêt 2 500 €, charges copro 1 200 €, assurance 400 €, frais de gestion 600 €, travaux 3 000 € → total = 7 700 €
  • Amortissement annuel (bien + mobilier) : 3 500 €
  • Revenu imposable = 15 000 − 7 700 − 3 500 = 3 800 €

Le résultat fiscal est considérablement réduit, ce qui diminue fortement l’impôt + prélèvements sociaux.

Conclusion

Pour un bailleur privé, qu’il loue un logement nu ou meublé, la maîtrise des charges déductibles est l’un des piliers de l’optimisation fiscale. Sous le régime réel, vous pouvez déduire une large gamme de dépenses — intérêts d’emprunt, travaux, copropriété, assurance, gestion, entretien, voire amortissement pour le meublé — à condition qu’elles soient payées, justifiées et liées à un logement loué.

Compte tenu des réformes en cours, des contraintes énergétiques, et de la montée des coûts de l’immobilier, le régime réel apparaît en 2025–2026 comme un outil particulièrement attractif pour ceux qui investissent, rénovent ou exploitent un parc locatif. À l’inverse, le régime micro reste pertinent — mais surtout pour des biens sans charges ou des loyers modestes.