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Revendre son bien immobilier à des investisseurs : bonne ou mauvaise idée ? 

 

Dans un marché immobilier marqué par la hausse des taux d’intérêt, les tensions sur l’offre locative et le recentrage des dispositifs fiscaux, nombreux sont les propriétaires qui envisagent de revendre leur bien à des investisseurs plutôt qu’à des particuliers. 

Si cette option peut offrir certains avantages (vente rapide, absence d’émotionnel), elle comporte aussi des limites (négociation à la baisse, analyse du rendement). Cette décision doit donc être pesée à la lumière de plusieurs critères : objectifs du vendeur, type de bien, situation du marché local et fiscalité applicable.

      À qui vend-on exactement ? Identifier les profils d’investisseurs

A. Investisseurs particuliers : rentiers ou optimisateurs fiscaux

L’acquisition d’un studio constitue une stratégie prisée des investisseurs débutants. Les investisseurs particuliers représentent la majeure partie du marché locatif privé. Ils achètent des biens pour les louer, souvent dans le cadre d’une stratégie patrimoniale (revenus complémentaires, transmission, défiscalisation).

  • Ils sont attentifs à la rentabilité nette, aux charges, à l’état du bien et à la demande locative.
  • Ils privilégient des biens déjà loués (avec locataire en place), ou éligibles à des régimes fiscaux (LMNP, Pinel, Denormandie...).

Exemple : Mme E vend un studio loué à Lille. Un investisseur LMNP le rachète sans demander de travaux, car le locataire est stable et le bail est conforme. La vente se fait rapidement, sans négociation excessive.

B. Sociétés civiles et foncières : une logique patrimoniale 

Certains biens, notamment ceux à fort potentiel locatif (immeubles, grandes surfaces, biens commerciaux), peuvent intéresser des SCI familiales ou des foncières professionnelles.

  • Ces entités cherchent à constituer un parc immobilier stable, à long terme.
  • Elles peuvent acheter en bloc (immeuble entier) ou en démembrement (usufruit temporaire).

Exemple : Un propriétaire à Angers vend un immeuble de 4 appartements à une SCI familiale qui recherche un rendement brut de 5 %. La vente est réalisée avec engagement de maintien des baux.

C. Promoteur ou marchands de bien  : une logique de valorisation  

Certains biens parfois obtenus via un héritage ou délabré, notamment ceux offrant une grande surface, un terrain constructible, un immeuble à découper, peuvent intéresser des marchands de bien ou des promoteurs.

  • Ces acteurs cherchent des biens ou du foncier à valoriser par l’intermédiaire de travaux, d’une découpe, d’un agrandissement, etc ...
  • Ils achètent rapidement et peuvent se positionner sur des biens atypiques. 

Exemple : Un propriétaire en périphérie de La Rochelle vend une maison familiale sur un terrain de 800m². La vente est réalisée avec engagement d'obtenir un permis de construire sur une partie du terrain. 

    Avantages de vendre à un investisseur

A. Une transaction rapide et rationnelle

Contrairement à un acquéreur qui achète pour y habiter, l’investisseur raisonne en chiffres. Il analyse le bien en fonction :

  • de sa rentabilité locative nette ;
  • du potentiel de valorisation (plus-value future) ;
  • de la fiscalité applicable et de la TVA sur marge pour les professionnels.

Résultat : les négociations sont souvent plus rapides, centrées sur des critères objectifs (prix, rendement, état), et moins exposées à l’émotionnel.

Selon les notaires de France, 27 % des ventes de logements anciens sont réalisées à des investisseurs (2023).

B. Vendre un bien loué sans rupture de bail

Il est tout à fait légal de vendre un bien occupé, en maintenant le locataire en place. Le bail se poursuit alors aux mêmes conditions, et le nouvel acquéreur devient simplement le nouveau bailleur.

Cela permet de vendre sans délai (pas besoin de congé pour vente), tout en conservant la stabilité d’un revenu locatif.

Exemple : Mme J, propriétaire d’un T2 à Toulouse, souhaite vendre rapidement. Elle ne souhaite pas délivrer de congé. Elle le revend occupé à un investisseur, ce qui lui évite 6 mois d’attente et de perte de loyer.

     Les inconvénients et limites à connaître

A. Un prix de vente souvent revu à la baisse

Un investisseur n’achète pas à n’importe quel prix. Il applique souvent un coefficient de rentabilité (rendement brut ou net attendu), ce qui peut le conduire à proposer un prix inférieur à celui attendu par le vendeur.

Par exemple, un bien loué 600 €/mois, soit 7 200 €/an, vendu 150 000 € génère un rendement brut de 4,8 %. Si l’investisseur cible 6 %, il proposera 120 000 €.

Résultat : vendre à un investisseur peut impliquer une décote de 5 à 15 % selon les marchés et le niveau de loyer.

B. Attention au plafonnement fiscal et au risque de requalification

Certains régimes fiscaux encadrent strictement les conditions de revente. C’est le cas notamment des logements Pinel, Denormandie ou soumis à l’encadrement des loyers.

Le non-respect des engagements peut entraîner :

  • une restitution des avantages fiscaux ;
  • des pénalités si le bien est vendu trop tôt ou sans respecter certaines conditions.

Exemple : Mme S revend un appartement Pinel après 5 ans (au lieu de 6). Il perd alors les avantages fiscaux obtenus sur les 5 premières années, sauf cas de force majeure (décès, chômage, invalidité...).

En LMNP, il n’existe pas de conditions de revente. Le seul point de vigilance est la réintégration des amortissements déduits dans le calcul de plus value depuis le 15 février 2025. [Maillage Interne]. Néanmoins vous continuez à bénéficier de l’abattement pour durée de détention. 

Des questions fiscales ? Prenez rendez-vous avec nos experts Qlower

    Fiscalité de la vente à un investisseur

A. Calcul de la plus-value immobilière

En cas de vente, la plus-value immobilière est soumise à :

  • 19 % d’impôt sur le revenu + 17,2 % de prélèvements sociaux = soit 36,2% ;
  • Un abattement pour durée de détention démarre à partir de la 5ème année de détention : exonération totale au bout de 22 ans pour l’impôt et 30 ans pour les prélèvements sociaux.

Ce régime s’applique que le bien soit vendu à un investisseur ou un particulier, sauf résidence principale (exonérée).

B. Cas particulier du bien loué en LMNP

En LMNP au régime réel, la plus-value est calculée selon le régime des particuliers, même si le vendeur a amorti le bien (contrairement au LMP). Néanmoins, le propriétaire doit réintégrer les amortissements déduits dans le calcul de plus value depuis le 15 février 2025. [Maillage Interne] tout en continuant à bénéficier de l’abattement pour durée de détention.  

Exemple : Marc revend son studio loué en LMNP après 10 ans. Il a amorti 40 000 €. Sa plus-value imposable est calculée sur la différence entre prix d’achat et prix de revente, auxquels il faut réintégrer les amortissements déduits,  ce qui peut réduire la trésorerie dégagée de la vente.

     Stratégies pour optimiser la vente

A. Vendre "meublé et loué" pour cibler directement les LMNP

Proposer un bien :

  • meublé ;
  • avec locataire stable ;
  • générant des revenus réguliers ;

… est très attractif pour les LMNP, qui cherchent à générer un cash-flow immédiat.

Bonus : en zone tendue, cela évite les démarches de relocation ou de remise en état.

B. Valoriser les travaux ou dispositifs fiscaux récents

Il est pertinent de communiquer sur les travaux récents, les performances énergétiques (DPE), ou les dispositifs en cours (Pinel, déficit foncier, Denormandie).

Exemple : Claire vend un immeuble rénové avec isolation, chaudière gaz neuve, DPE classé B. Ces éléments justifient un prix de vente plus élevé pour l’investisseur, qui anticipe de faibles charges.

     Comparatif : revente à investisseur vs particulier

Critères Vente à investisseur Vente à particulier
Délai de vente Rapide Parfois long (émotionnel)
Prix proposé Inférieur (rendement) Souvent supérieur
Locataire en place Accepté Peut freiner la vente
Négociation Chiffrée, rationnelle Variable
Plus-value 37,2% + Abattement pour durée de détention 37,2% + Abattement pour durée de détention
Avantage principal Vente rapide, sans congé Meilleur prix potentiel

     En résumé : à faire ou pas ?

Vendre à un investisseur est une bonne idée si :

  • l’objectif est de vendre vite sans congé ;
  • le bien est déjà loué, difficile à libérer, squatté, ou atypique ;
  • vous acceptez une négociation sur le prix, en échange d’une simplification de la vente.

À éviter si :

  • vous espérez vendre au prix du marché libre ;
  • votre bien est idéal pour une résidence principale (grande surface, maison familiale) ;
  • vous êtes dans une zone à forte demande résidentielle.

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