8 min reading

Ne pas déduire ses amortissements comptables en LMNP : bonne ou mauvaise idée ? 

Le statut de Loueur en Meublé Non Professionnel (LMNP) est l’un des dispositifs fiscaux les plus avantageux pour les investisseurs immobiliers.
Grâce à la déduction des amortissements comptables, il permet souvent de neutraliser totalement l’impôt sur les loyers pendant plusieurs années.

Pourtant, certains bailleurs choisissent, ou se laissent conseiller, de ne pas déduire leurs amortissements pensant ainsi “préserver la plus-value” de la revente.
Une idée séduisante en apparence, mais souvent mal comprise.

Faut-il vraiment renoncer à l’amortissement en LMNP ? 

Décryptage complet.

Le mécanisme de l’amortissement en LMNP 

1. Le fonctionnement fiscal

En LMNP au régime réel, les loyers sont imposés dans la catégorie des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC).
Le propriétaire peut déduire :

  • les charges réelles (frais de gestion, assurance, intérêts d’emprunt, taxe foncière, etc.) ;
  • et surtout les amortissements comptables du bien immobilier et du mobilier.

Définition :
L’amortissement correspond à la perte de valeur théorique du bien due à l’usage et au temps.
Il n’implique aucune sortie de trésorerie, mais réduit le bénéfice imposable.

2. Les durées d’amortissement typiques

Élément amorti Durée Taux annuel moyen
Bâtiment (hors terrain) 25 à 40 ans 2,5 % à 4 %
Mobilier / Électroménager 5 à 10 ans 10 % à 20 %
Travaux d’amélioration 10 à 15 ans 7 % à 10 %

Exemple :
Bien acheté 200 000 € (dont 180 000 € amortissables) + 10 000 € de mobilier.
→ Amortissement annuel ≈ 6 000 €.
Si les loyers nets sont de 5 000 €, l’impôt devient nul.

3. Un avantage fiscal majeur

  • L’amortissement et les charges permettent de réduire le bénéfice imposable.

  • Les déficits liés aux charges sont reportables pendant 10 ans sur des revenus de même nature (location meublée).

  • Les déficits liés aux amortissements (article 39 C du CGI) sont reportables indéfiniment, ce qui permet de neutraliser le bénéfice imposable sur de très longues périodes.

Pourquoi certains choisissent de ne pas amortir ? 

1. L’argument de la “plus-value préservée”

Beaucoup de propriétaires pensent, à tort, que déduire les amortissements augmente la plus-value imposable à la revente, comme en société à l’IS.
Ils craignent que l’administration “rattrape” les amortissements, comme en société à l’IS.

Or, en LMNP au régime des particuliers, les amortissements comptabilisés sont désormais réintégrés dans le calcul de la plus-value imposable à la revente (hors résidences de services).
La fiscalité s’applique donc sur la différence entre le prix de vente et le prix d’acquisition, augmentée des amortissements pratiqués.

Exemple :

  • Appartement acheté 200 000 €, amorti à hauteur de 50 000 €, revendu 250 000 €.

  • → Plus-value imposable = 250 000 – 200 000 + 50 000 = 100 000 €.

  • L’avantage fiscal de l’amortissement n’est plus totalement conservé à la revente, mais il permet toujours de réduire fortement l’imposition pendant la durée de détention.

2. Les cas où la déduction est volontairement différée

Certains investisseurs choisissent de reporter l’amortissement :

  • pour simplifier la comptabilité lors des premières années ;
  • ou lorsqu’ils bénéficient déjà d’un déficit reportable issu d’autres charges (travaux, intérêts d’emprunt).

Cette stratégie peut se justifier temporairement, mais elle réduit le levier fiscal global, car les amortissements non pratiqués ne peuvent jamais être récupérés ultérieurement.

3. Les cas où l’amortissement est techniquement impossible

  • Bien entièrement amorti : aucun amortissement supplémentaire possible.
  • Régime micro-BIC : application d’un abattement forfaitaire de 50 %, sans comptabilité réelle.
  • Logement détenu via une SCI à l’IR : amortissements interdits, car ce régime relève des revenus fonciers.

Mais dès qu’un bien est exploité sous statut LMNP au réel, ne pas amortir revient à renoncer à un avantage fiscal majeur. 

Les conséquences de l’absence d’amortissement 

1. Un impôt sur les loyers beaucoup plus élevé

Sans amortissement, les loyers nets imposables augmentent mécaniquement.
Les revenus BIC s’ajoutent au revenu global, soumis :

  • au barème progressif (jusqu’à 45 %),
  • et aux prélèvements sociaux (17,2 %).

Simulation :
Loyer net 8 000 € – amortissement 0 €.
→ Imposition moyenne 30 % = 2 400 € d’impôt/an.

Avec amortissement 6 000 €, revenu imposable = 2 000 € → impôt 600 € seulement.

Sur 10 ans, l’écart peut dépasser 18 000 €.

2. Un rendement net amputé

Hypothèse Avec amortissement Sans amortissement
Loyer annuel net 8 000 € 8 000 €
Impôt annuel moyen 600 € 2 400 €
Revenu net après impôt 7 400 € 5 600 €
Rendement net (sur 200 000 €) 3,7 % 2,8 %

Soit 0,9 point de rentabilité perdu chaque année.
Sur 15 ans, cela représente près de 20 000 € de manque à gagner.

3. Une comptabilité moins optimisée

Ne pas amortir revient à payer l’impôt sur des bénéfices fictifs.
De plus, cela peut complexifier l’éventuelle évolution vers le statut LMP (Loueur Meublé Professionnel) ou à une cession en société, car les valeurs comptables ne reflètent plus la réalité économique du bien. 

Les situations où renoncer à l’amortissement peut se justifier

1. Pour un LMNP de courte durée ou ponctuel

Si le bien est destiné à être vendu rapidement (moins de 2 ans), les frais de comptabilité peuvent dépasser le gain fiscal.
Dans ce cas, le micro-BIC (abattement 50 %) est souvent plus rentable.

Exemple :
Studio loué 6 mois par an à 9 000 € → revenu net imposable 4 500 €.
Pas d’amortissement, pas de tenue comptable, fiscalité simplifiée.

2. En cas de recettes faibles ou de location partielle de résidence principale

Les locations ponctuelles ou les chambres louées à domicile peuvent rester en dessous du seuil d’imposition.
Il est alors inutile de recourir à une structure LMNP complète.

3. Pour préserver un équilibre comptable dans une société à l’IS

Dans une SCI à l’IS, les amortissements impactent la valeur comptable et la plus-value de cession.
Mais attention : cette logique ne concerne pas le LMNP individuel, qui relève du régime des particuliers.

 Tableau récapitulatif : amortir ou non en LMNP ?

Critère Avec amortissement Sans amortissement
Imposition sur les loyers Très faible ou nulle Élevée (jusqu’à 45 %)
Gestion comptable Complexe (expert-comptable conseillé) Simple (micro-BIC)
Rentabilité nette 20 à 30 % plus élevée Réduite
Plus-value à la revente Inchangée Inchangée
Fiscalité globale sur 10 ans Optimisée Lourde
Pertinence Tous LMNP au réel Petits revenus / location courte

Conclusion

Renoncer à déduire ses amortissements en LMNP est presque toujours une erreur.
L’amortissement est le cœur du dispositif, permettant de transformer une rente brute en revenu net quasi défiscalisé, sans altérer la plus-value future.

Sauf cas particuliers (petit bien, location ponctuelle ou micro-BIC), le régime réel amorti reste imbattable.
C’est ce qui fait du LMNP, même en 2025, l’un des placements immobiliers les plus performants sur le plan fiscal. 

En résumé : ne pas amortir, c’est renoncer volontairement à de l’argent.

Des questions fiscales ? Prenez rendez-vous avec nos experts Qlower.

Sources

  • Qlower, Webinaire Réforme fiscale 2025, 20 mai 2025
  • BOFiP, BOI-BIC-CHAMP-40-20, mise à jour 2025
  • DGFiP, Guide LMNP – régime réel vs micro-BIC, avril 2025
  • Notaires de France, Patrimoine et fiscalité immobilière 2025
  • INSEE, Performance locative et fiscalité du logement, 2024
  • Conseil d’État, arrêts du 12 mars 2025 et 8 avril 2025 (non-réintégration des amortissements)